Je relisais le premier chapitre. Quel est le projet ? Je lis le résumé de ce que tu m’as montré et je fais à ma sauce ? C’est marrant ça, je n’ai vu que ton petit pénis… Moi, personnellement, je me fais rire. C’est important… Oui, on va commencer, c’est mieux… Merci.
Matthieu proposa donc son roman à son éditeur qui était ravi de son contenu. Enfin, il semblait s’être retiré du fondement le balai qui le rendait si ennuyeux. Et à la surprise de tous, le torchon remporta une forte adhésion du public, on salua la sensibilité du beau au bois de Boulogne (En vérité, un cauchemar pareil pourrait se réaliser… Tu sais qu’ils écrivent des livres avec des héroïnes qui forniquent avec des lézards ? Du coup, tout peut passer à ce niveau… Je ne digresse pas non.).
Matthieu proposa donc ce gros pavé sans intérêt à sa maison d’édition pensant que la blague s’arrêterait là, bla bla, les ventes décollèrent aussitôt, ce qui ne manqua pas de lui arracher la mâchoire. Mais ce n’était que le début d’un long calvaire pour Matthieu Suppôt, qu’une bonne partie de la presse et de ses lecteurs ne prenaient plus au sérieux. Il reçut de terribles critiques, on lui décerna le prix du « traitre » de l’année, on remit en cause son intelligence. Son agent tenta de le rassurer sur le fait que cela retomberait bien à un moment. Mais plus les ventes explosaient, plus Matthieu se rendait malade à force d’être confronté à l’immense promotion délirante de son « fuck » du plus mauvais goût. Son agent s’inquiétait de son état de santé et mental, il perdait énormément de poids, maugréait parfois entre deux pintes qu’il s’était fourvoyées avec le diable. Son éditeur se nommait aussi Mathieu, mais l’agent et son éditeur lui avaient attribué le petit nom de Satan, ce qui lui plaisait beaucoup en vérité. Il avait lu « Le beau au bois de Boulogne » et avait trouvé ça proprement à chier, mais comptait déjà les ventes d’un public cible en attente constante de romances de ce type.
— Je n’y comprends rien, avait-il dit lancé à Matthieu et son agent, mais ça va certainement cartonner.
— Non, mais je déconnais voyons, tu ne vas pas produire un truc pareil ? Interrogea l’autre avec angoisse.
— Pourquoi tu me la proposée alors ?
— Pour te faire réfléchir à ce que tu fais, ton métier, tu te perds, c’était pour te rappeler ton amour de la littérature…
— C’est de la littérature Monsieur Condescendance.
— Mon neveu de 3 ans peut te chier un tome de ce type… Tu…
— Tu ne peux pas publier ça ! Intervint l’agent de l’écrivain, tout aussi dépité. Il va devenir la risée d’une bonne partie du public et de son audience surtout. Il voulait voir ta réaction, mais jamais il n’aurait pensé que tu lancerais l’impression sans BAT, sans réunion… C’est quel genre de technique ça ?
— Technique de grand connard d’éditeur. Un contrat a été signé, il me devait encore un dernier livre, et celui-là fera l’affaire. Je ne suis pas totalement con, tu voulais qu’on le jette pour te libérer Mat. Mais, manque de chance pour toi, j’accepte.
— Ça va te ruiner et tu l’auras cherché, fulmina ce dernier.
Sauf que les ventes culminaient, et plus on parlait de lui, plus il semblait se rapetisser sur lui-même. Matthieu s’évaporait. Il avait pris le pari de se présenter aux interviews pour vomir son travail et montrer la stupidité de tout ceci, mais Satan avait tout organisé, il n’apparaitrait pas.
— Tu ferais fuir tes lectrices qui t’imaginent sans doute comme un de tes personnages hyper gaulé. Ne t’en fais pas. On communiquera différemment, ça va créer un putain de mystère qui les fera mouiller de plus belle.
La rupture de stock du livre acheva son créateur qui sentit un soir de beuverie solitaire son cœur disparaitre sous sa poitrine et s’écroula dans son lit.
— Allô, Parapet ? Soupira Satan à l’autre bout du combiné. L’agent de Matthieu avait distingué ce ton si peu enjoué, blasé et un poil irritant qui le caractérisait et la rendait furieuse.
— Oui saloperie ? Dis-moi, il est 3 h du matin !
— Ce n’est pas à cette heure-ci que tu enfiles ton balai de sorcière pour aller t’astiquer dans les bois avec tout plein de crapauds ?
— Bordel Mathieu qu’est-ce que tu me veux ?
Elle perçut un soupir interminable et se préparait à une joute verbale sévère.
— Je crains que ton poulain nous fasse une blague sinistre, vient à toute allure à l’hôpital Debré !
Pardon ? On arrête là pour aujourd’hui ? Vous aimez ? J’ai changé le temps oui et le ton pour garder un peu de sérieux tout de même. Oui, je peux le refaire demain, j’ai sincèrement besoin de cet argent. Le premier jour, le récit était plus long non ? Le second moins, comme ta bite… Oui, oui promis, plus de vanne sur ta banane si tu arrêtes de reluquer ma poitrine. Être le responsable de projet ne te donne pas le droit de me considérer comme un produit, trou du cul… Oui, voilà, restons-en-là.
À demain les losers.
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